Comme tous les mois, à l'Hôpital psychiatrique Des Prés, Adrien Lambert, médecin spécialiste en psychiatrie, rend visite à ses patients. Soudain, il entend un cri : c'est Mme Custodis qui fait une crise. Celui-ci se précipite vers la chambre 12, et aide l'infirmière à se défaire de Mme Custodis qui s'est accrochée à elle en prétendant voir des démons qui voudraient la manger. Adrien la rassied calmement sur son lit, la rassure, vérifie son traitement, et la laisse aux bons soins de sa collègue. En poursuivant ses visites il passe devant M. Hubert qui ne cesse de parler, Mme Janina qui demande toujours à dormir et vivre dans le noir, ou encore devant la chambre 23 où M. Chablin, comme à son habitude, chante. Au fur et à mesure il se rapproche de la chambre 35 dans laquelle se trouve M. Sera, un patient arrivé il y a quelques jours. il n'a pas encore eu le temps de le rencontrer, et de ce qui lui a été rapporté par ses confrères M. Sera s'exprime de manière inintelligible, il emploie des mots que personne ne comprend.
Devant la porte de la chambre Adrien toque. Rien. il frappe une nouvelle fois. Toujours rien. Il décide d'entrer. Sur le pas de la porte il écarquille les yeux, ne bouge plus, ses pieds sont comme cloués au sol. Tout autour de lui les murs sont couverts de mots écrits au stylo. Des lignes, et des lignes de mots s'enchevêtrent. Interminables. Ces mots il ne les a jamais vus ailleurs. Amphigourique, S'ébaudir, Embrouillamini, Abir, Sorgue, Métromanie, Capiteux, Factieux, Irascible, Pérégrin, Superfétatoire, Velléitaire, Fuligineux, Vésanie, Obvie, Foutriquet et bien d'autres mots serpentent les quatre murs de la chambre. M. Sera, assis sur son lit, écrit sur un bout de couette.
- Bonjour Monsieur Sera ! Je suis Adrien Lambert, votre médecin. Je viens voir comment vous vous portez. Vous aimez bien écrire on dirait !
M. Sera répondit par un haussement d'épaule avant de montrer du doigt une feuille posée sur sa table de chevet. adrien s'approche et lit : "Labile, Immarescible, Salmigondis, Torve, Encomiastique. Ces mots et tous ceux que vous voyez autour de vous parlent pour moi. Ecoutez les, ils vous diront ce que vous voulez savoir." Adrien repose le papier, contrôle la santé de M. Sera (qui ne dit rien), et s'en va, tout en gardant en mémoire ce message qui lui reste dans la tête le reste de sa journée. De retour chez lui il se met à chercher le sens de certains mots qu'il a retenu. il réalise alors que ces mots expriment ce que ressent son patient, de ses émotions contradictoires à son désordre mental. ils décrivent ces moments où il ne sait plus où il va, où il se questionne sur le sens de la vie, où il a peur de ce qui pourrait lui arriver, où il a des visions. Mais pourquoi M. sera détourne le langage pour se faire comprendre ? A-t-il des difficultés à dire ouvertement ce qui le tracasse ? Qu'est-ce qui l'empêche de parler autrement ? Face à ces questions qui dansent dans sa tête Adrien décide de prendre un peu de repos. Il réfléchira mieux ainsi et, il se dit, une fois la lumière éteinte, qu'il trouvera le fin mot à ce mystère.
Pendant ce temps, à l'hôpital Des Prés, M. Sera rajoute, sur sa feuille, une dernière phrase : "Dans cette histoire chaque mot a un sens."
Lucie R.
(Le texte n'est pas libre de droits.).
N.B. : Sera signifie Soir en italien.