C’était un soir de janvier.  Il faisait déjà nuit. Le téléphone a retenti.

C’était l’ex-femme de mon compagnon. J’ai tout de suite compris qu'il y avait un problème : elle n’appelait jamais d’habitude et encore moins à cette heure déjà tardive.  J’ai tendu l’oreille,  essayant d’après les réponses de Manu, de deviner ce qu’il se passait.  Puis il a raccroché et m’a expliqué qu'il devait se rendre chez son ex-femme, qu'il y avait eu un problème entre son troisième fils, Erwan, et son demi-frère Jérôme. 

J’ai tout de suite compris.  J’ai tout de suite su. Je savais,  à l’instant où il est parti,  qu’il allait revenir avec Erwan et ce qu'il allait m’annoncer. J’espérais vaguement me tromper mais malheureusement ce ne fut pas le cas.

Quelques heures plus tard, Florent revint effectivement avec Erwan, qui fila dans sa chambre sans un mot. Je demandai donc ce qu’il s’était passé.  Ce qui est surprenant,  c’est que je ne me souviens plus aujourd'hui des termes exacts qu’il a employés pour me répondre,  mais en résumé,  j’appris à cet instant que Erwan,  alors âgé de quinze ans, venait de violer son demi-frère,  Jérôme,  âgé à cette époque de quatre ans. 

(...)

Et puis, quelques mois ont passé,  et le téléphone a retenti de nouveau. 

Cette fois c’était une amie, qui se trouve être la tante maternelle des enfants de Florent.  J’ai simplement demandé si cela avait un rapport avec Erwan,  elle m’a répondu que oui. Je lui ai dit que je dirai à Florent de la rappeler quand il arriverait.

Là encore,  j’avais compris.  Je suis partie vomir mon angoisse dans le jardin en attendant que Florent revienne.  Lorsqu’il est entré,  je ne lui ai même pas laissé le temps d’ouvrir la porte avant de lui expliquer qu’il devait rappeler son ex belle sœur de toute urgence. 

Il a donc juste pris le temps de poser son sac avant de décrocher le combiné. 

Et là encore,  malheureusement,  j’avais vu juste. 

En effet,  l’ex belle sœur de Florent lui a ainsi indiqué que sa fille aînée,  âgée de six ans,  en revoyant Erwan (...) avait par la suite adopté un comportement étrange.  Ses parents,  inquiets, avaient fini par réussir à la faire parler: deux ans auparavant,  donc quand elle avait quatre ans,  Erwan l’avait attouchements sexuellement. La petite avait gardé ce "secret " pour elle pendant deux ans....

Et là tout s’effondre. (...)

J’étais hors de moi. J’avais envie de le tuer ! (...)


Publié le 14/12/2025 / 15 lectures
Commentaires
Publié le 14/12/2025
Merci Vickie pour ce texte d’une force bouleversante. Il m’a profondément touché et laissé dans un état de sidération et d’empathie. Le pressentiment que tu écris ici n’est pas abstrait : il est viscéral, implacable, et terriblement humain. Tu parviens à dire l’indicible sans jamais tomber dans l’effet ni le jugement, avec une retenue et une justesse qui forcent le respect. Ce texte est difficile à lire, mais nécessaire. Merci d’avoir eu le courage de l’écrire et de le partager dans cet atelier. Bien à toi Michel
Publié le 15/12/2025
Bonjour Michel Merci pour ce gentil commentaire. Si tu as ressenti ce pressentiment comme profondément humain c'est parce que je l’ai vraiment vécu. C’est un extrait (coupé par endroits) de mon autobiographie car malheureusement il y a des choses qui ne s’inventent pas...
Publié le 14/12/2025
Ton texte Vickie est pareil au souffle d’une explosion sui emporte tout sur son passage. C’est terrible et c’est malheureusement devenu un sujet d’actualité car un récent rapport indique que 30% des agressions sexuelles sur mineurs, sont commises par des mineurs. Entre 2017 et 2024, les cas sont passés de 8 900 à 15 729. Et 93% des mineurs auteurs de violences sexuelles sont des garçons. C’est un fléau qui s’appuie sur un autre chiffre accablant : 50% des enfants ont déjà été confrontés à de la pornographie avant 13 ans. Dès 12 ans une majorité de garçons consulte régulièrement ces sites. On comprend que la France a enfin décidé d’agir sur l’accès aux sites pornographiques et que l’Australie vient de frapper un grand coup en voulant éloigner les moins de 16 ans des écrans en leur interdisant d'accéder aux réseaux sociaux.
Publié le 15/12/2025
Bonjour Léo et merci pour ton commentaire. Je ne connaissais pas ces chiffres mais n’en suis pas étonnée malheureusement. Dans le cas d’Erwan (ce n’est pas son vrai prénom évidemment) le drame, peut-être encore pire que les actes par eux mêmes a été le regard de la police d’abord " ça sera classé sans suite". Il a fallu taper du poing sur la table pour qu’Erwan soit jugé et réponde de ses actes devant un tribunal. Ensuite celui des pedopsychiatres experts qui ont jugé le viol de son demi-frère comme "une pulsion liée à l’adolescence" presque normale...
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