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Passeport en larmes
Chapitre 2

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Il avança, montrant sa valise à un type posé devant le tapis roulant d’un de ces engins, en demandant à mi-voix - « Check ? security ? ». Le mec, avec une moustache et une peau de bronze, le regardait sans réponse. Il avança encore - « Check ? Are you the security check ? ». Pas de réponse. Il sourit au mec : « Check ? ». Le moustachu cuivré leva simplement les yeux en répondant « Blitish Ailways ? ». Ah non, c’était pas ça, lui c’était Air France, et il articula bien à fond en disant ça. Le type le fixa en répétant son truc, « Blitish machin ». Bon, inutile d’insister avec ce mec et il s’éloigna avec sa valise-check. Il y avait d’autres cubes à rayons X, ces machines comme des tanks à tapis roulants. Il allait de tank en tank, montrant ses bagages. « Air France? Check ? » On le rabrouait mollement, on l’ignorait, au mieux faisait-on à son endroit un vague geste vers une machine ou une autre.

 

Il était là à piétiner en rond comme un derviche tourneur, les bagages à bout de bras, cherchant son tank à lui. Les rayons X pour Air France, c’était où ? Il allait de gauche à droite et sa valise pesait. Ses jambes raide dansaient une valse-hésitation sur la gomme molle du sol. Ce fut par hasard qu’il aperçut une petite affiche collée sur une des machines : « Air France passengers proceed to Malaysian Airlines for security check ». Retour au centre stratégique des machines, au centre des rayons X. C’était déjà plus clair. Malaysian Airlines c’était un bon indice. Et en effet, au bout de quatre ou cinq arrêts à questionner et à montrer ses bagages, il trouva. Les fameuses malaisiennes. Ouf ! Il laissa tomber sa valise et son bagage à main le longs des rouleaux, qu’il avait désigné du doigt tendu avec un large sourire : « Air France ». Le bagage à main, quelle erreur. Le gardien du tank s’égosilla « Handglugglage off ! Hein ? Handglugglage off ! ». Il comprit qu’il fallait le reprendre « Ah yes, hand luggage, yes bagage à main ». C’était un rayon X anti bagage à main de toute évidence. Ça cahotait à la sortie de la chenille dans le croupion qui recrachait les bagages.

 

Il y avait un autre type pour tamponner et étiqueter. On lui colla une étiquette Malaysian Airlines sur la valise. Il expliqua que non, non lui c’était Air France. Paf, l’étiquette Air France se colla à côté de la malaisienne. Il valait mieux avoir deux autocollants que rien, non ? Il reprit la valise et s’éloigna sous le souffle des ventilateurs. Mais était-ce bien prudent cette étiquette en double ? Il s’agenouilla et décolla le sticker malaisien. On ne savait jamais. Maintenant ça y était il était paré pour embarquer. En règle.

 

22h15, les guichets d’Air France venaient d’ouvrir, il était parmi les tout premiers. Semelles conquérantes sur le caoutchouc, il approchait des comptoirs., quand soudain une voix glapissante le héla – « sir, sir airport tax ». Il se retourna, un type derrière un stand façon tombola lui faisait signe. Il approcha, expliqua que la taxe d’aéroport était incluse dans le prix du billet. Mais rien n’y faisait et le type insistait avec son airport tax. Alors il paya, le type lui donna son billet de tombola, et il retourna au comptoir d’embarquement. Trois minutes plus tard il posait sa valise sur la rampe d’accès des bagages et il étalait tous ses papiers sur le rebord du guichet. Billet d’avion, passeport, taxe d’aéroport. Quoi encore ? Non, rien, c’était tout, c’était bon. Il avait placé sa valise de façon que soit bien en évidence l’étiquette et le tampon du « security check ». Il ne s’agissait pas de se faire renvoyer dans la queue des rayons X pour cause de tampon trop discret. Et il attendait bien sagement les coudes sur le comptoir que le type en face finisse de trifouiller dans ses tiroirs. Un type en turban, moustache en arabesque, cravate noire et chemise blanche, un maharadjah des guichets d’embarquement.

 

Là aussi ce fut long. Il y avait des problèmes avec l’imprimante pour les cartes d’accès à bord. Il avait précisé que son bagage devait être enregistré jusqu’à Genève, ok ? Ok avait répondu le maharadjah, et il lui avait tendu deux cartes – Delhi-Paris, et Paris-Genève, avec le coupon pour le bagage en soute collé sur le billet. Et une étiquette (encore) pour le cartable qu’il avait en bagage à main. Décidément ils aimaient les étiquettes par ici. Tout était enregistré, ça allait.

Publié le 17/07/2025 / 17 lectures
Commentaires
Publié le 22/07/2025
Tes récits sont vivants sur des choses banales car tu maîtrises bien les figures de style notamment celui de la personnification, merci Stanislas pour cette nouvelle aventure et ce nouvel envol à venir.
Publié le 22/07/2025
Merci Léo. L'aventure sera bien modeste, car tout se passe en avion.
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