Les mots au fil et à mesure
Quelle merveille, quelle beauté.
Nous sommes comme dans une librairie pleine de mots.
Nous cherchons les nôtres,
nous les soupesons,
nous les associons.
Adjectifs, verbes, conjugaisons,
épithètes, oxymores,
questions ou affirmations…
Nous composons notre phrase
comme on compose une tenue sur mesure :
en harmonie, avec soin, avec intuition.
On la peaufine,
on la refait,
on l’efface,
on recommence.
Elle nous plaît.
Puis non.
Alors on change un mot,
un temps,
un ton.
On ferme les yeux,
on cherche ailleurs,
on tâtonne.
Et peu à peu, le brouillon prend forme.
Les phrases deviennent une histoire.
Une histoire qu’on s’écrit d’abord à soi-même,
que d’autres comprendront — ou pas.
Chacun lit avec ses propres lunettes.
Les histoires, les romans, les poèmes…
Rien n’est jamais figé.
Tout peut se lire autrement.
Si le texte est simple, on le suit.
S’il est plus complexe,
s’il évoque des événements qu’on ne connaît pas,
on devine, on suppose,
on lit entre les lignes,
on débusque les images,
les silences, les ellipses,
le sens caché…
Tout cela, on le pose doucement sur la feuille.
Et la feuille devient un espace de rêve,
un monde suspendu.
Et puis vient la fin.
Ou pas.
On recommence.
On signe.
Ou non.
On rature, on revient,
on affine.
C’est ça, écrire.
C’est tisser les mots,
à la machine à écrire,
au fil,
et à mesure.
Les mots justes,
les mots à soi.
Et les offrir au monde.