Un petit bonhomme qui se trouvait là sans trop savoir pourquoi. On l’écoutait. Yeux goguenards, au milieu d’impressions bizarres. Quelques heures à discuter.
Puis, sur les quais, il est seul. Petit ventre bedonnant, il sourit enfin. Les lumières de la ville – et il repense à un dialogue de vieilles dames dans un autobus.
« Madame Martin ?... Morte dans son sommeil… » « Ah oui ! Son mari était gaulliste ! »
Des passants à cette heure de la nuit. Marche plus rapide. Il se sent bien. Il ralentit. Rentrer chez lui ? Oui… plus tard. Il marche. Des réverbères des trottoirs des pas… tout est sombre. Il doute. Doute d’être vraiment là. Où habite-t-il ? Il ne doit pas le savoir. Pas encore. Plus loin peut-être. Mais là, il marche. On ne lui a pas dit où il allait. Il est pourtant ici à sa place comme nulle part.
Que disait-il pour qu’on l’écoute ? Il ne sait plus. Ne sait pas. Il doit marcher, continuer à marcher. Parce qu’il n’est rien d’autre. C’est dommage, il y croyait presque. C’est aujourd’hui. Ni hier ni demain aujourd’hui, c’est tout. Il sait maintenant. Qu’il marche et qu’il s’arrêtera. Sans rien qui suit.
Il se fait à cette idée. Plus serein. Quelque part, on tient à lui : on lui tend la main. Alors il est rassuré. Il tourne, prend une ruelle. Une ruelle sombre.
— Il sent alors
Qu’il doit s’effacer
Démarche lente
La ruelle se fait étroite
Devient ombre
Ça y est.
Déjà.
(extrait)