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Plan à trois TDM ETA05

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     Passé le court moment d'euphorie causé par la trouvaille du parchemin, nous nous sommes vus, sales, en sueur, nos vêtements à l'état de loques, sans savoir précisément où nous nous trouvions mais nous sachant poursuivis par des voyous armés.

     Elle, contrariée, moi, de mauvaise humeur, dans cette bicoque ouverte aux courants d'air, nous avons tout arrêté. Nous avons suspendu toute activité de sorte qu'aucun de nos mots, qu'aucun de nos gestes, qu'aucun de nos regards ne puisse faire du mal à l'autre, ne puisse venir l'égratigner. Nous redoutions l'infection.

     D'interminables secondes se sont ainsi écoulées avant que mon amour s'assoie sur le rebord d'une fenêtre.

     Alors, je suis sorti. Aucun signe de nos poursuivants. Excepté le frôlement indolent des feuilles séchées agitées par le vent, tout était silence jusqu'à ce que mon téléphone sonne dans ma poche.

- "Allo ?"

- "Patrice ? Ça va ? C'est Joe ! C'est pour te dire que finalement, le rendez-vous se fera dans le quartier d'affaires du Business Gateway, à "Mon Trésor" et non pas au siège de la filiale.

- "Joe ! Tu ne peux pas savoir combien ton appel tombe bien. Nous sommes perdus dans un bled abandonné. Tu pourrais peut-être nous sortir de là ?"

- "Décris-moi ce que tu vois autour de toi et je t'envoie ma cousine, tu verras, elle est très efficace. Moi, je dois finir d'imprimer les documents que le juge m'a transmis pour que la perquisition de tout à l'heure soit parfaitement légale."

     Un quart d'heure plus tard, Bernadette arrivait dans un pick-up et nous embarquait nous et nos vélos avant de nous déposer à notre hôtel. Joe viendrait me prendre vers 13 heures m'a-t-elle dit, avant de s'éloigner dans son camion.

     On est rentrés, on s'est douchés, on a mangé et Joe est arrivé. Josiane avait décidé de rester à l'hôtel pour lire un peu au calme les aventures de son si-pittoresque-commissaire-Montalbano.

     Sur la route, Joe m'a un peu expliqué comment les choses allaient se dérouler. Ce serait très simple, pensait-il, mais une fois arrivés, non pas une mais trois surprises nous attendaient sous la forme d'avocats, une dame et deux messieurs, sapés comme Sharon Stone et Don Johnson. Installés dans le hall de l'immeuble, ils nous toisaient. Joe s'est raidi.

     Comment ils nous regardaient ! Leur sourire aimable puait le mépris. Leurs mains tendues transpiraient le dégoût. Leur regard n'était que condescendance. Autant de détails presque imperceptibles qui me rappelaient un instituteur, lors d'une réunion des parents, 49 ans plus tôt "Il fait son possible, Madame. Il est très courageux. Qu'il continue comme ça." avait-il dit à ma mère. Sur le coup, tu crois que c'est un compliment et tu es fier parce que tu n'as pas compris ce qui se cache derrière les mots. Mais quand même, dans un coin de ta tête, ils se frayent un chemin. Et plus tard, ils alimenteront un doute qui limera sournoisement ta confiance durant toute ta putain de vie.

     J'ai attrapé Joe par le bras, nous sommes ressortis. "Ils veulent nous énerver ! Restons calmes, Joe ! Je sais ce qu'ils veulent faire, je vois bien leur jeu ; ils espèrent nous pousser à la faute pour sauver leur client". J'ai dit ça à mon jeune collègue avec un beau et large sourire, me sachant observé par les trois mignons à travers la large porte-fenêtre de l'immeuble.

     Second demi-tour devant la brochette de faux-culs qui exige les documents signés du magistrat en charge. Joe s'exécute, un peu fébrile. Puis, ils veulent nous accompagner alors que nous sommes dans l'ascenseur. Alors, c'est moi qui prend les choses en main et qui leur dit, cabotin au diable : "Rest assured that we deeply regret to do without your company in the spaces specified by the judge during the search, ladies and gentlemen, but you cannot ignore that your presence would jeopardize the very validity of the procedure." L'expérience donne quelques leçons qui parfois sont un vrai délice à répéter. Les portes se sont fermées et nous sommes montés, Joe et moi.

     Depuis notre première rencontre, on le savait, on jouait dans la même équipe alors dans l'ascenseur en mouvement, lui et moi, on était reliés et on jubilait, heureux de notre complicité, de notre audace et aussi sans doute un peu d'avoir rembarrer l'instituteur qu'il avait certainement du croiser, lui aussi.

     Une fois dans les bureaux de la TotalEnergieMaurice, avec les deux agents mis à notre disposition, on a filmé tous les documents qui pouvaient nous intéresser et les ordinateurs qu'on a pu trouver. On y a apposé les scellés et on a tout emporté au palais de justice, département fiscalité.

     On était pressés de jeter un premier coup d’œil sur notre prise de guerre et on savait que ça prendrait un peu de temps. Alors j'ai appelé l'hôtel pour prévenir Josiane que je rentrerais tard. Mais elle était partie une demi-heure après moi ; quelqu'un, dans une grosse voiture noire, d'ailleurs accidentée, était passé la prendre, m'a expliqué le portier qui a ajouté, me sentant inquiet, que je pouvais être rassuré car elle était enjouée en franchissant la porte du hall de l'hôtel pour rejoindre la voiture.

     "Bon ben si Josiane est enjouée, moi, je peux bosser tranquille" j'ai pensé. Elle m'expliquerait cette nuit. Du coup, Joe et moi, on s'y est mis. Je classais les documents papier pendant que Joe convertissait les données des disques durs en concret à répertorier plus tard. On avait bien avancé lorsqu'on nous a livré des pizzas que l'administration nous avait fait préparer.

     Les cartons sur les genoux et des quartiers en mains, Joe et moi, fatigués, on regardait tout ce bazar sans plus rien dire. Une espèce de lassitude avait tari notre loquacité. On entendait plus que nos masticages. Après quelques minutes, Joe a dit "C'est bizarre, ce truc" en regardant un gros IBM obsolète, posé sur le sol au fond de la pièce. Les mains encore encombrées de notre repas, nous nous sommes approchés. "S'ils gardent cet ordi, il y a une raison." j'ai dit. Joe a ouvert la tour grise. Et, scotché sur le fond, on a pu voir une calepin bleu clair. Rien n'était écrit sur la couverture. Joe l'a saisi et me l'a donné. On l'a survolé ensemble :

20/01/2010 : M prend contact avec T et propose ses services.

28/07/2010 : T demande des précisions.

29/07/2010 : M indique une taupe chez T. M peut nommer la taupe et détruire les

informations rapportées par la taupe.

05/02/2010 : T demande des gages de bonne foi.

06/02/2010 : M nomme la taupe mais ne détruira pas les infos sans paiement. La taupe

s'appelle Julian Bauerschmidt.

15/02/2010 : T licencie la taupe. T accepte le deal. T propose un prix différent. Un montant

important mais inconnu dont la trace a été trouvée lors de forages. Aucune trace dans la comptabilité.

25/02/2010 : M vient rencontrer T à Maurice.

26/02/2010 : T dresse le bilan avec F, son spécialiste. Les S seront mis à disposition. M

pourra garder 60 % de ce qui sera récupéré. F a toute liberté pour engager des

agents supplémentaires qui se partageront 40 %.

(...)

"Y'a que ma Josiane qui pourra comprendre ce charabia. Je suis trop fatigué, Joe. Je te laisse. Je te demande pardon. Tu me tiens au courant ? A demain !" et je suis rentré, raccompagné par un policier dans un véhicule banalisé.

     En arrivant à l'hôtel, le portier m'a fait un sourire un peu étrange avant de me remettre un billet plié en deux. "Rejoins-nous au sous-sol, dans la salle de billard. Je l'ai privatisée pour nous, mon chéri. Viens vite !" signé "Ta Josiane !"

     Nous ? Comment dire ? En 23 ans, Josiane et moi avions très partiellement levé le voile sur quelques uns de nos fantasmes érotiques. Il nous faudrait probablement des siècles, sinon des millénaires, pour apprendre toutes nos lubriques limites. Il avait fallu plus d'un an depuis notre premier baiser pour que j'ose, sur l'oreiller, lui dire quelques mots un peu voyous qui l'avait, à ma grande surprise mais aussi à ma très grande joie, rendue plus fougueuse encore. Porté par son inespéré répondant, j'avais alors osé des tournures plus audacieuses encore. Mais là, ça avait été le flop. Après que nous ayons repris haleine, Josiane m'avait d'ailleurs un peu débriefé à ce sujet. Ce n'est qu'après cinq ou six ans de vie commune que je suis entré pour la première fois de ma vie dans un sex-shop. J'y ai feint d'y muser, comme j'imaginais que les habitués faisaient, l'air de rien, lorsque la vendeuse m'a rejoint pour me demander ce que je cherchais, d'une façon tellement naturelle et amicale que je suis parvenu à articuler presque intelligiblement

- "Voilà ! C'est pour un ami qui cherche une paire de menottes...".

- "Je ne connais pas votre ami mais il est sûrement plus doux qu'il ne le prétend. Les menottes, c'est dur, ça fait mal sans compter qu'on peut perdre les clefs. Il existe des articles de "bondage" largement aussi excitants qui ne blessent pas et ne risquent pas de mettre votre ami dans une position ridicule. Essayez ceci !" me dit-elle en me tendant un article "Made in Germany" avec le bruit froid du plastique qu'on froisse. "Une notice claire en français l'accompagne. Que votre ami en prenne connaissance !" ajouta-t-elle avec son léger accent néerlandais.

- "D'accord ! Il sera sûrement ravi." J'ai ajouté sans avoir pu vraiment deviner le sens du mot "bondage". Je me débrouillerais. J'ai payé et alors que je glissais le paquet sous ma veste, la demoiselle, souriant à pleines dents, m'a tendu une pochette noire et opaque pour y ranger mon inavouable achat. Enfin tout ça pour dire que notre confiance mutuelle, à Josiane et à moi, s'était créée très doucement, sans brusquerie, à la vitesse des stalagmites. C'était peut-être aussi pour cela qu'après 23 années, nous avions encore aussi faim l'un de l'autre. Et là, Josiane me propose un plan à trois. En un clin d’œil, on va passer de l'Antiquité à la Révolution française. Nos dieux n'y survivront pas.

     Fébrile je me suis dirigé vers l'escalier que j'ai descendu. J'ai traversé un corridor peu éclairé tapissé de velour rouge avant de pousser la porte "billiard room". Et là, j'ai vu Josiane et Barbara assises de part et d'autre d'une petite table ronde en merisier. Elles partageaient un Cognac et semblaient beaucoup s'amuser. A mon entrée, elle se sont retournées vers moi, se sont regardée et ont éclaté de rire.

"Cognac, whisky ? Ah non, mon amour ! Tu préfères les alcools sucrés. Je te prépare une vodka pomme" me dit Josiane avant de poursuivre en regardant Barbara "La première fois que nous nous sommes embrassé, j'ai trouvé qu'il avait un goût de pain d'épice. Il est tellement sucré !"

     Barbara m'a ensuite tout expliqué. Elle avait été engagée par Fabien quelques jours auparavant en tant qu'appât en vue de mon kidnapping lors de mon arrivée à Maurice mais ma "stupidité" - il fallait bien appeler un chat, un chat - avait fait rater l'affaire. Lorsque l'opération de Fabien serait terminée, elle aurait du toucher 7,5% de la prime, soit un quart car l'équipe composée des deux débiles, de Fabien et d'elle empocherait 30% du magot. C'est Michel qui raflerait les 70% restant.

- "Mais de quel magot parlez-vous, Barbara ? Et de quel Michel ?" ai-je dit.

- "Totalenergies Maurice a triché dans ses comptes afin de défiscaliser des bénéfices. Mais un de ses comptables, un certain Julian Bauerschmidt a dénoncé ces agissements au fisc français puisque Total détient son siège principal à Paris." a poursuivi Barbara.

- "Ah mais attendez ! Lors de la perquisition, nous avons trouvé un calepin que j'ai ici avec moi. Il y est question d'un certain Bauerschmidt me semble-t-il."

- "Donne-moi ce carnet, mon chéri."

Je l'ai remis à Josiane qui y a immédiatement repéré ce qu'il y avait à voir.

- "Regardez ici "06/02/2010 : M nomme la taupe mais ne détruira pas les infos sans paiement. La taupe s'appelle Julian Bauerschmidt." Et tu m'as dit que tu avais cru reconnaître ton collègue Michel-de-l'internationale. "M" c'est ton Michel qui a dénoncé Bauerschmidt à "T", TotalEnergies contre rétributions. Mais comment payer Michel sans que ça n'apparaisse dans la comptabilité ? Avec de l'argent qui n'appartient pas à "T" mais que "T" peut procurer à "M", le trésor de ton grand-père, Patrice."

-"26/02/2010 : T dresse le bilan avec F, son spécialiste. Les S seront mis à disposition. M

pourra garder 60 % de ce qui sera récupéré. F a toute liberté pour engager des agents supplémentaires qui se partageront 40 %. " Mais Fabien m'a parlé de 30% pour l'équipe ! Son of a bitch de Fabien ! Il voulait se prendre 17,5% pour lui !"

- "Mais pourquoi as-tu trahi tes compères Barbara ?" ai-je risqué.

- "Parce que 100% à trois, c'est mieux que 30 à quatre, non ? Et puis tu es so cute, Patrice."

J'ai un peu rougi, Josiane s'est marrée, Barbara m'a fait un clin d’œil.

     Mais Il y avait plus à raconter. En fin d'après-midi, fortes de leur union, Barbara et Josiane étaient allées retrouver le chaman au sac violet qui leur avait remis un sac avec un tuba et un masque. En repassant en ville, elles en avaient acheté deux autres car nous retournerions ensemble demain, le chaman nous avait donné rendez-vous dans un immeuble de la rue des ombrelles, le sept, "Umbrella street".

     Le lendemain, à dix heures, il faisait chaud, très chaud dans la mal nommée rue des ombrelles parce que de l'ombre, il n'y en avait pas le début de la queue. Debout, habillée d'une robe légère écru, Barbara, s'aérait avec un éventail de la couleur de ses yeux alors que Josiane, dans la même position, en short kaki relisait le carnet pour la centième fois. Moi, je les regardais, si différentes, Barbara, si belle et exotique, Josiane, si charismatique et familière. A dix heures et sept minutes, un grand type noir avec un chapeau buse décoré d'un dodo a ouvert la porte et nous invité à le suivre d'une voix incroyablement grave avec un "welcome" carrément inquiétant. Je suis entré le premier suivi de Barbara et de Josiane.

     La pièce sans fenêtres dans laquelle nous avons été amenés n'avait pas de taille, on n'en distinguait pas les limites, de l'encens y flottait et épaississait l'air où apparaissaient, de façon très diffuse, les lueurs dansantes de probables flambeaux. La musique ternaire d'un trio de musiciens invisibles pénétrait mes conduits auditifs. Le géant, d'un geste ample, nous a priés de nous asseoir sur le sable ocre qui constituait le sol. Près de nous, des écuelles en bois attendaient, fumantes, notre arrivée. D'un second geste impératif, il nous a indiqué d'en boire le brûlant breuvage. Puis, il s'est mis à danser. Ma poitrine s'est décomposée en une multitude de particules chaudes. Mes yeux se sont fermés. Derrière mes paupières, j'ai continué à le voir. Ses vêtements semblaient démesurés, ses bras étaient prolongés par des pièces de tissus noires qui flottaient lentement, créant une ombre décalée derrière sa transe naissante. Les sons m'emplissaient la tête. Je sentais que je perdais pieds, que j'allais tomber en arrière, sur le dos, que ma tête allait toucher le sol, qu'un son continu aigu résonnerait, que nos trois esprits, à Josiane, à Barbara et à moi s'aligneraient vers une vision future.

     Nous nous sommes réveillés sur une plage. Nos corps allongés formaient un triangle au centre duquel, un sac en tissu rouge était entrouvert. Il contenait trois amulettes faites d'os et une statuette qui m'a rappelé mon ancêtre, Albert Montluçon. Elle en était peut-être le fantôme.

     Encore secoués de l'expérience qu'on venait de vivre, on s'est tous rappelé d'une chose, l'absolue nécessité de nous rendre sur l’îlot bénitier.


 


Publié le 12/08/2022 / 1 lecture
Commentaires
Publié le 14/08/2022
Il y a des passages tout à fait délicieux avec de belles formules et de bonnes allusions à du vécu, ce qui rend cet épisode le plus passionnant à lire. J'aime le "Sur le coup, tu crois que c'est un compliment et tu es fier parce que tu n'as pas compris ce qui se cache derrière les mots", par exemple :-)) Par contre, je remarque que Juan et Diégo n'ont toujours pas la moindre faveur de Josiane & Co. Tant pis, cela n'a vraiment pas beaucoup d'importance.
Publié le 14/08/2022
C'est vrai que j'ai du mal avec Diego et Juan. Durant des années, j'ai vu des spectacles de danse et tous m'embêtaient. Techniquement parfaits, ils ne m'intéressaient pas. Je voyais de jolis corps souples et colorés se mouvoir en réalisant des figures époustouflantes et ça me laissait froid. J'ai mis du temps à comprendre pourquoi ; ces femmes et ces hommes parfaits n'étaient plus des humains mais des espèces de divinités. Dans ces conditions, je ne pouvais pas me projeter à travers eux. C'est ce qui se passe avec tes deux personnages en ce qui me concerne. Ils ne sont pas de mon univers. Je t'en demande pardon. ;-)
Publié le 15/08/2022
Je suis très surpris de votre retour pour deux raisons essentielles. La première est que ce « jeu » autour d’un « trésor » se fait dans le cadre d’un site sur l’écriture. En conséquence, l’intérêt majeur est de voir les diverses manières d’écrire, d’interpréter des consignes, de construire une histoire… mais aussi de noter de belles tournures, une richesse de vocabulaire, etc. Ne regardez-vous donc que des films dont les personnages correspondent au type de personnes que vous appréciez ? Pour ma part, je n’ai pas le moindre attrait pour les personnes un peu trop gogo ou bisounours à mon goût, et encore moins pour les facilités du genre « un singe est passé devant nous avec une chauve-souris sur le dos ! ». Pourtant, je prends plaisir à découvrir certaines idées ou à lire de jolies phrases et expressions dans vos textes. La seconde est relative aux « femmes et hommes parfaits ». Je suis totalement incapable d’imaginer à quoi peut ressembler une personne parfaite ! Vous faites un lien entre Diégo/Juan et des spectacles de danse. Pour être danseur il faut avoir un certain côté exhibitionniste, et sans doute une belle estime de soi. Or c’est tout l’inverse pour les deux personnages. Discrets, fuyant les foules, simples dans leur train de vie et leurs goûts, ne recherchant aucune reconnaissance spécifique (on ne les applaudit pas, eux !), ils sont pourtant au service de la société en s’engageant par leur job à lutter contre certains salopards. J’ai un vieil ami pompier qui m’inspire précisément Diégo, et l’homme est beau (selon mes seuls critères ! donc bien moins beau pour d’autres) ce qui n’est pas un crime. Donc pas plus pour Diégo. Par contre, bien malin qui pourrait trouver Juan parfait, car absolument rien n’est écrit en ce sens !!! Ce serait même presque l’inverse. Belles ou pas, j’aime les personnes engagées, qui n’ont rien à exhiber d’autre que leur vie honnête et simple, et leurs petits travers qui les rendent justement attachants, ce qui me permet de parler avec le même enthousiasme d’Oreste, de madame sourire dans son manger lakaz… ou de Diégo et Juan. Je crois que cette fois, je n’ai rien compris à votre fixation sur des personnages « parfaits ». J’espère quand même avoir écrit autre chose qu’un hymne à je ne sais quelles « divinités ». Ce serait un comble pour l’agnostique que je suis.
Publié le 15/08/2022
Sur Ipagination, j'ai découvert différents auteurs, différents styles et également différentes meurtrissures à travers certains textes. Parfois, j'ai lu, commenté ou indiqué "j'aime" parce pour une raison ou une autre, je voulais encourager l'auteur et lui montrer ma sollicitude. Mais lorsqu'un texte ne me plaît pas, je ne vais pas me forcer à le lire jusqu'au bout à des fins pédagogiques ou autres. Je ne souhaite pas être un lecteur ou un auteur universel qui aurait un "vocabulaire total". J'arrête simplement ma lecture. Et ce D'autre part, ce que j'ai voulu exprimer dans ma précédente réponse, c'est le "pourquoi" je n'adhère pas à certains textes car je ne prétends pas que ce que j'aime est bon et ce que je n'aime pas ne le serait pas. Toutefois, en nous relisant vous et moi, je me rends compte que je me suis mal exprimé. Durant toute ma vie, mon père ne m'a jamais parlé. JAMAIS ! C'est à dire qu'il m'a dit des tonnes de phrases mais je ne l'ai jamais vu à poil lorsqu'il s'adressait à moi en me parlant. Dès lors, ses mots ne m'intéressaient pas. Et bien en lisant les aventures de Diego et Juan, j'entends mon père. Je n'ai pas l'impression d'entendre un cri, un hurlement, une confession, une révolte, une confidence, un élan d'humanisme, un désenchantement cruel et donc, ça ne m'intéresse pas. "L'infection" relevée par Fabien ou "la réunion des parents" que vous avez notée, c'est ce qui m'intéresse. Le reste, pour moi, c'est du remplissage, c'est du liant, c'est l'assiette de fond. Les récits d'aventure, comme je le disais à Fabien, ce n'est pas ma tasse de thé. J'espère m'être mieux exprimé et ne pas vous avoir blessé. ;-)
Publié le 15/08/2022
"Vous n'avez pas l'impression d'entendre un cri..." et il est peut-être là le hic ! Plusieurs fois blessé dans ma vie, je vous rassure, vous ne me blessez pas. Les seules blessures qui me donnent envie de chialer maintenant sont celles qui se passent actuellement si invraisemblablement dans un monde trop haineux à mon goût et où tant d'humain révèlent ce qu'ils sont vraiment. Mon père ne m'a fait aucun cadeau non plus. Plus ou moins que le vôtre, je ne sais pas, ça n'a aucune importance. Pourtant, alors que je l'ai fuit très jeune en choisissant les pensionnats et l'éloignement géographique, à 45 ans je l'ai vu s'effondrer d'un coup, terrassé par de graves maladies. Mon père était mort, mais pas l'homme que je n'avais jamais connu jusque-là. Seul, je l'ai accompagné jusqu'à son dernier souffle, comme je l'avais fait pour ma mère. Comme quoi. Cet exemple juste pour dire que derrière ce que l'on croit être des évidences se cachent souvent de terribles histoires. C'est précisément le cas de Diégo, mais je ne peux rien dire maintenant. Un peu mon histoire, un homme qui a dominé les drames de sa vie pour en faire sa force.... tout en devenant, évidemment, plus dur, plus blasé, plus méfiant... des apparences. Et qui rit de lui parce qu'il se sait oh combien mortel. Pour conclure, voici une anecdote qui fermera la boucle. Un jour j'ai écrit une nouvelle, qui a été publiée d'ailleurs. L'histoire d'un enfant battu et maltraité, inspirée d'un fait réel. Vous auriez sans doute aimé le texte, car il était dès les premières lignes "un cri, un hurlement, une confession, une révolte, une confidence, un élan d'humanisme, un désenchantement cruel". Bien que validé par un jury d'expert, ce texte n'a rencontré que des critiques négatives ou presque. "ça ne fait pas rêver", "c'est le genre d'affaire qu'on entends aux infos", "ce n'est pas ce que l'on recherche dans une histoire", etc. Même si ce fut un choc, sur le coup, j'ai vite compris une chose : ce qui m'a permis de vivre plutôt que de mourir, ce n'est pas ce genre d'histoire, mais beaucoup plus celles de gens que l'on croit forts (ou parfaits, ou...) et qui se révèlent être les grands rescapés de grands drames. De fait, c'est ainsi que j'écris depuis, parce que dominer d'abord ses douleurs et ses angoisses avant d'en laisser paraître certains fondements me paraît plus percutant. Voilà pourquoi vous n'avez pas l'impression, puisque le cri vient plus tard. Après d'autres cris, d'ailleurs (comme ceux sur les cimetières de Maurice). Ne vous trompez pas trop vite, je n'ai aucune affinité pour l'eau de rose, les romans d'aventure, Sylvain et Sylvette, ou les Marseillais au Mexique : j'écris dans la douleur, presque toujours dans la douleur, parce que la douleur m'habite. Mais je crois en la force de vaincre qui nous habite tous, si nous le voulons, même si c'est pour continuer à prendre dans la gueule les réalités du monde. Donc je ris aussi.
Publié le 14/08/2022
Ah Patrice, te voici dans le grand bain. La forme de tes textes était déjà de bonne facture, mais là je dois avouer que le fond n'est pas mal non plus. Tu nous proposes une belle intrigue sur fond de grande société. Tout est bien ficelé, les incises fonctionnent bien' Et notre Josianne est toujours aussi radieuse. Tu te sers intelligemment de tous tes personnages, jusqu'à la délicieuse Barbara. Fais attention à Diégo, il m'a l'air d'être un chaud lapin. Et ce serai en effet amusant que vos toutes se croisent dans le texte. Et ce son of bitch de Fabien alors.. sourire. J'ai de l'avenir je crois dans les affaires louches. En tous cas bravo l'ami.
Publié le 14/08/2022
Je suis très content que tu aies relevé ces mots qui sont ce que j'ai le mieux réussi, je trouve, dans cette épisode. Pour le fond, je ne peux pas continuellement me révolter. Il fallait bien, à un moment ou à un autre, que j'aille dans le sens du grand architecte. j'ai fait de mon mieux mais ce n'est pas dans cette discipline que je me sens le meilleur. Mais je fais de mon mieux et je suis content si tu estimes mon travail honorable. ;-)
Publié le 15/08/2022
Nous sommes en plein dans l'intrigue mais aussi dans la connaissance des personnages qui se livrent encore plus. Au carrefour de tous les possibles avec encore de nombreuses options possibles. Tu sembles savoir où tu vas et cela se sent à la lecture ce qui fait que l'on déroule de façon très plaisante la narration. Comme Jean-Luc, je trouve le premier paragraphe en gras excellent car une nouvelle fois il puise dans des scènes de vies que tout le monde a vécue, avec ce désagréable sentiment de jugement, qui peut effectivement semer de gros doutes dans l'avenir. Cette forme de cynisme qui grave parfois d'injustes fragilités. A te retrouver sur l'ilot bénitier.
Publié le 15/08/2022
Tu es trop gentil ! ;-) En fait, non. Je ne sais pas très bien où je vais. Je me laisse conduire par l'architecte. Ceci dit, j'ai parfois des fulgurances durant mes nuits insuffisamment réparatrices. La fraude fiscale et la trahison de Barbara sont des idées nocturnes à froid. L'infection vient d'une troisième lecture, les dos des femmes est la récupération d'une idée évoquée dans un autre texte. tout ça se mélange et crée cette histoire. Tiens ! Hier, j'ai vu "The swimming pool", l'histoire d'une auteure qui part écrire ailleurs. Je te recommande ce film. D'une certaine façon, il va dans le sens de ce que je viens de te raconter. Bise ! ;-)
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