Levant les yeux vers moi, ma femme a trouvé la force de me sourire avant de pleurer à nouveau. Avant que l'on m'emmène, j'ai pu aller l'embrasser une dernière fois. Elle m'a murmuré quelques mots dans le creux de l'oreille.
- Cela ne change rien, Christian. Je veux juste que tu saches que je t'aime. Cinq ans, ce sera vite passé. Et moi je t'attendrai. Tu entends? Je t'attendrai.
Je ne savais pas si je devais prendre cela comme une promesse d'amour ou celle d'un sacrifice. Quand même, ses paroles m'ont donné un peu d'espoir. Et de l'espoir, il allait m'en falloir, et du vrai, pas de cette imposture qu'on implore pour tout et pas grand-chose. Des tripes qu'il lui faudrait remonter ce petit miracle pour que je finisse par croire au bout du compte qu'il existe peut-être pire à vivre encore par-delà les barreaux. La taule, ça avale tout, le bien comme le mal. C'est sur le vif qu'on la prend, sans se retourner et sans comprendre. " La taule, m'avait-on dit, c'est un train infernal et accidenté qui continue de rouler sur sa carcasse." C'est cela qu'on m'avait dit. Un train... Et le voilà qui siffle à présent. Il se tord déjà au loin avec tous ses wagons. C'est l'enfer, il vient pour moi. Demain il m'aura pris...