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Besoin d’amour
Père en alcool,
mère en dépression.
Quatre sœurs entassées dans une chambre moyenne, deux par lit.
Le fils, seul dans sa chambre, isolé. Pourquoi ?
Famille sans tendresse, sans amour.
Le fils passe souvent du temps chez son meilleur ami, fils unique, couvert de tendresse et de baisers par sa mère.
« Pourquoi pas moi ? » se demande-t-il, déjà malheureux.
Il décide de chercher, de ressentir l'amour.
Il est éveillé et il s'imagine sur son lit de mort.
La porte est fermée, personne ne peut l'entendre.
Il commence à organiser sa mort.
Il pleure, à sanglots, en torrents.
Il est hypersensible.
Il entend ses sœurs discuter, rigoler, échanger avant de s'endormir. Il n’est pas de la partie, c’est un garçon. Dans cette famille, il y a un malaise avec la sexualité, et il l’apprendra bien plus tard dans sa vie. Ce malaise restera marqué, archivé, et ressortira un jour. Lorsqu’il comprendra qui il est. Peut-être.
Il imagine ses quatre sœurs et ses parents à son chevet.
Ils pleurent, tous ensemble, la mort du fils, du frère.
Il fait durer ce moment, ce simulacre d'affection.
Ils lui disent : « Je t'aime, nous t'aimons tellement. »
Ses oreillers sont inondés.
Il se reprend doucement, s'apaise, s'endort.
Il vient d'avoir la preuve qu'on l'aime.
Il a dix ans.
Et il comprend qu'on l'aimera quand il sera mort.
Il perpétue ce rituel régulièrement
Pas tous les jours.
Juste quand il besoin d’être aimé
C'est la seule preuve d'amour qu'il connaisse.
Cela l'apaise et l’endort.
Est-ce fou ?
Oui, c'est complètement fou
Mais cette illusion l'aide à vivre.
Il ne veut pas inquiéter sa mère.
Son père, lui, n'existe qu'en vinasse.
L'amour, enfin ressenti, l'apaise.
Tristement.
Plus tard jusqu'à ses 14 ans je crois, il s'entendra se faire répéter : que c'est un vaux rien, un âne, un incapable, une triple buse, un veau.
Même sa grand-mère paternelle s'y mettra, qu à son âge son père jouait au foot, allait au filles, buvait des canons. Il remettra sa grand-mere en place dans une colère et elle ne lui adressera plus jamais la parole.
Lui il prenait la défense de sa mère en silence jusqu'àu jour où il remit son père ivre en place, ce qui lui dû de monter dans sa chambre s'enfermer car il l'aurait tué ou assomé. Il ne sait pas, ce fut très très violent
À partir de ce jour il souffrira en silence de la dépression de sa mère et pour très très longtemps. L'héritage de sa mère.
Je dois inclure ici pour casser l'ambiance les vacances qu'il passait chez cette grand-mère dans un petit village, on l'appellera
Son village d’enfance
C’était un petit village, pas bien grand,
juste assez pour contenir le bonheur d’un été.
Il y arrivait comme on entre dans un lieu de vacances
sans bruit, sans fracas, mais le cœur déjà ouvert.
Chez sa grand-mère paternelle,
tout le monde se retrouvait.
Elle avait quatre enfants, et tous venaient.
Avec leurs conjoints, leurs enfants,
et puis il y avait son oncle de Marseille,
qui arrivait avec Micheline, Luc et Bertrand.
Ils arrivaient en DS.
Et quand il voyait la DS…
Il savait qu’ils étaient au complet.
Il restait deux semaines, peut-être plus,
mais le temps, là-bas, n’avait plus la même façon de compter.
Sa grand-mère avait trois vaches.
Ils allaient les chercher au champ,
on les ramenaient, ils faisaient la traite le matin.
Ils riaient entre cousins, cousines.
Ils jouaient à papa et maman,
on prenaient le café dans des tasses imaginaires,
Ils s’inventaient des familles, des maisons, des vies.
Ils jouaient sérieusement,
comme seuls les enfants savent jouer.
Ils allait se promener dans la forêt de sapins.
Un jour, il trouvé une montre.
Ils ont mis une annonce dans le journal.
Les gens l’ont récupérée et lui ont donné 50 francs.
Il se souviens. Il était fier.
Il y avait une fontaine,
juste à côté de la maison de sa grand-mère.
Les vaches venaient y boire.
Devant la maison, un petit jardin,
derrière aussi, avec des arbres fruitiers,
et partout, des capucines,
qui poussaient dans les rochers.
Il revois leur orange éclatant,
comme des rires accrochés à la pierre.
Sa grand-mère avait bricolé une balançoire
avec une corde à une branche solide.
Il s’y balançait haut,
comme si il voulait toucher le ciel.
Un soir, ils avaient marché sur la route étroite,
jusqu’au feu d’artifice du 14 juillet.
Il n’y avait pas beaucoup de voitures.
Il y avait surtout la nature,
et eux,
ensemble.
Puis ils ont grandi.
Les étés se sont faits plus courts,
les retrouvailles plus rares,
et un jour, la DS n’est plus venue. Ils étaient partis vivre à Nouméa et revenaient rarement.
(Lorsqu’il voyait Luc son cousin que rarement après le départ très loin. C’était un déchirement quand il repartait, Luc était beau souriant plein de vie et toujours accroché au cou de sa maman il l’enviait terriblement. Lorsqu’il partait, il lui fallait une semaine pour s’en remettre, il était malheureux et pleurait en silence la boule au ventre )
Quand la DS repartait
Ils avait ri,
Ils s’était salués cent fois,
Ils avait dit “à l’année prochaine”,
et il s’était presque promis
de ne jamais grandir.
Mais la DS repartait.
Elle tournait au bout du chemin,
et lui je restais là,
sans rien dire.
Il pleurais.
Pas fort.
Mais pour de vrai.
Parce que c’était fini.
Parce que c’était beau.
Parce que il le savais déjà.
Tellement de choses à dire, tellement de souvenirs…
Son cousin Luc décéda d'un accident de moto à l'âge de 50 ans