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Une vie comme beaucoup d’autres, peut-être…
Premiers frissons Premières douleurs

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Chapitre 7

Premiers frissons, premières douleurs

 

Tout se passe bien à Chambéry. Il travaille au restaurant, et le directeur est content de lui. Mais lui, il veut évoluer. Il rêve de passer à la réception, puis plus tard au marketing. En attendant qu’un poste se libère, il reste en salle. L’ambiance est bonne. Respectueuse. Chaleureuse, parfois même un peu trouble.

 

Après Yvan, c’est au tour du chef de réception de l’inviter. Un après-midi au bord du lac, pas très loin. Il comprend vite que ce n’est pas une simple promenade. Mais il n’est pas dupe, et ne joue pas non plus les aguicheurs. Il accepte l’invitation avec simplicité. Sans provocation. Sans naïveté non plus.

 

Au bord de l’eau, l’autre se déshabille, reste en caleçon de bain. Lui, il garde ses vêtements. Hors de question de montrer son corps. Trop de honte. Trop de silences imprimés dans la peau. Il prétexte qu’il fait frais. L’autre lui dit qu’il lui plaît. Il répond comme à Yvan : qu’il ne sait pas. Il ne sait pas. Il n’a jamais été avec une fille, ni avec un garçon. Il ne savait même pas que l’homosexualité existait, jusqu’à peu. C’est hors de question de faire quoi que ce soit. Et pourtant, il ne fuit pas. Il écoute. Il respecte. L’autre aussi. L’après-midi se termine. Rien ne se passe. Et c’est très bien ainsi.

 

Un poste se libère à la réception. Le directeur lui propose de le prendre. Il accepte avec joie. Il veut parler anglais, étudier, s’ouvrir au monde. Fini les allers-retours en salle. Il rejoint l’équipe de la réception. Yvan, désormais chef de service, est là. Et puis Gisèle aussi. Une femme charmante, vive, attentionnée. Ils s’entendent bien. Très bien. Une amitié naît.

 

Mais Gisèle tombe amoureuse. Elle est mariée, mais l’attirance dépasse les frontières de la raison. Un jour, elle l’invite dans son chalet, perché en montagne. Son mari n’est pas là. Elle est seule. Avec Boubou, un singe perché dans un arbre qui crache sur les visiteurs. Elle lui montre sa chambre. Elle attend quelque chose. Mais le pas ne viendra jamais. Il n’est pas amoureux d’elle. Il ne sait même pas s’il pourrait l’être d’une femme. Alors, il repart. Il redescend la montagne. Elle lui écrit une lettre d’amour, un peu folle. Il ne sait quoi répondre. Il laisse faire. Il s’éloigne doucement.

 

Mais avant Gisèle, il y a Olivier. Son ancien camarade de classe. Le garçon au briquet. Son copain, son confident. Olivier travaille désormais en Suisse, dans la même chaîne d’hôtels. Ils s’appellent parfois. Un jour, Olivier l’invite à Lausanne. Il y va, curieux. Heureux. Ils passent deux jours ensemble. Le soir, Olivier l’emmène dans un parc. Il ne comprend pas pourquoi. Il fait nuit. À un moment, Olivier lui dit de se cacher, vite, car quelqu’un arrive. Il ne comprend pas. Il ne sait pas que les hommes se rencontrent ainsi, dans des parcs. Il ne comprend rien. Ils rentrent chez Olivier. Rien ne se passe. Le lendemain, il rentre à Chambéry. Et il reste avec ce malaise, cette impression d’avoir été un crétin, un idiot. Un enfant dans un monde dont il ignore les codes.

 

Plus tard, ils décident de partir en vacances, ensemble. Avant Gisèle, toujours. Olivier vient à Chambéry. Ils partent en Italie avec la 2CV. Mais à Gap, dans les Hautes-Alpes, c’est l’accident. Plus de voiture. Vacances interrompues. Et c’est là, sans comprendre pourquoi, que ça monte. Qu’il ressent. Qu’il comprend peut-être. Il croit qu’il est amoureux de lui. Ou peut-être l’a-t-il toujours été.

 

Mais il ne dit rien. Il se tait. Il pleure, en cachette. Quand Olivier repart, il pleure encore. Il écoute Marie Laforêt. Fais-moi l’amour comme à seize ans. Il ne sait pas vraiment ce que ça veut dire, mais il ressent tout. Et il pleure encore. En silence.

 

Puis viendra Gisèle.

Publié le 19/07/2025 / 62 lectures
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