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Chapitre 11 – Vivant
Il se réveille dans sa chambre d’enfant.
Il ne comprend pas.
Une semaine s’est écoulée, mais il ne sait rien.
Pas d’hôpital, apparemment.
Sa sœur et son beau-frère l’ont sans doute transporté dans leur voiture.
Il a été couché là, comme un enfant qui revient de trop loin.
On ne lui explique rien.
Sa mère insiste pour qu’il urine. Il comprend que c’est important.
Le docteur a dû dire que c’est le premier geste, que cela prouverait qu’il revient.
Il a perdu dix kilos.
Il est hirsute.
Assassiné.
Muet.
Il reste allongé.
On lui donne des comprimés pour la dépression.
Il les prend, à moitié.
Il ne les supporte pas.
Il passe ses après-midi assis sur une chaise, au soleil, sans rien dire, sans rien voir.
Le vide.
Juste le vide.
Personne ne le serrera dans ses bras pour lui dire "je t'aime" il compris que ses simulacres de son enfance quand il se s'imaginait mort dans son lit n'étaient finalement que des mirages.
Et pourtant, il reste.
Un peu de force revient.
Il ne sait pas s’il veut vivre ou mourir, mais il sait qu’il ne peut pas rester là.
Alors il sort. Il va dans la ville voisine.
Il y rencontre un garçon : Pierre-François.
Ce garçon va être une main tendue.
Une présence. Un abri.
Il l’accueille chez lui, avec son chien.
Petit à petit, l’angoisse recule.
Ce n’est pas encore le bonheur, mais c’est déjà un souffle.
Pierre-François est étudiant.
Il va bientôt faire son service militaire.
Alors il lui laisse le studio, le temps d’un répit.
En 1989, une annonce paraît.
Un hôtel en Angleterre recrute.
Un chef du personnel vient à Paris faire passer les entretiens.
Il s’y rend.
Il est pris.
Avril ou mai, il prend sa voiture et part.
L’Angleterre. Une autre chance. Un autre départ.
Mais là-bas aussi, les vieux démons rôdent.
Les moqueries.
Le harcèlement.
Cette fois en anglais.
On le traite encore. “Faggot.”
Il comprend.
Il ressent.
Au bout de trois mois, il rentre en France.
Pierre-François est là.
Il le retrouve, puis ils partent à Dijon, où vit Pierre-François.
Là, il retrouve un travail : chef d’hébergement dans un hôtel-restaurant.
Bon salaire. Poste important.
Mais le directeur est un héritier qui ne connaît rien au métier.
Ils s’affrontent.
Il démissionne.
Il ne supporte pas l’injustice, ni l’arrogance des faux puissants.
Il est vrai.
Et il ne sait pas faire semblant.
Alors, en juillet 1990, il repart.
Cette fois avec Rachel, une amie d’école hôtelière.
Ils vont à Londres, partagent une chambre dans un Bed and Breakfast.
Ils cherchent du travail.
Ils en trouvent.
Rachel restera deux ans.
Lui, il restera plus longtemps.
Beaucoup plus.
Assez pour que sa vie reprenne.
Ainsi s'achève la première partie, nous le retrouverons à Londres bientôt.